Editorial

La solidarité internationale en panne ?

Chère lectrice, cher lecteur,

« La solidarité est la tendresse des peuples » fut un slogan du mouvement tiers-mondiste, à un moment où ce qu’on appelle aujourd’hui l’aide publique au développement, la fameuse APD, n’était qu’à ces débuts. À l’époque ce furent des citoyen.ne.s tant du Sud que du Nord global qui commencèrent à tisser des liens pour créer à très petite échelle des actions de solidarité qui consistaient en la mise à disposition de moyens financiers collectés au Nord pour répondre à des initiatives au Sud. Des actions d’abord ponctuelles, qui ont évolué vers des projets plus élaborés jusqu’à devenir des programmes pluriannuels.

Comparé à la taille de sa population, le Luxembourg a connu dès les années 1970 un nombre impressionnant de telles associations bientôt appelées « organisations non gouvernementales ». Prises dans leur globalité, elles constituaient un facteur déterminant de la coopération au développement. Au Luxembourg, l’APD ne sera institutionnalisée qu’à travers une loi fin 1985 créant le Fonds pour la coopération au développement. Elle va prendre un véritable essor vers la fin des années 1990 avec l’annonce du gouvernement de vouloir consacrer un budget qui correspond à 1% du revenu national brut à l’APD – ce qui va enfin catapulter le Grand-Duché dans le peloton de tête des pays bailleurs de fonds, du moins en termes relatifs.

Les ONGD (« D » pour développement) ont connu elles aussi une évolution, ceci grâce notamment à un système de cofinancement qui leur a donné l’occasion de démultiplier leurs actions et programmes avec leurs partenaires au Sud global. Ce, tout en gardant leur rôle de précurseurs sur de nouvelles thématiques, de défenseurs des intérêts de leurs partenaires dans le concert des négociations internationales et de vecteurs de l’éducation et la sensibilisation à un développement équitable auquel s’est ajoutée la couche d’une transition écologique, qui ne doit pas se réaliser sur le dos des plus démuni.e.s.

Si le consensus sur cette voie à suivre ne semble pas remis en question par une large majorité des partis politiques tant du gouvernement que dans l’opposition, des évolutions récentes laissent entrevoir des demi-teintes et pourraient faire craindre une remise en question de certains de ces acquis.

L’assise des ONGD dans la population luxembourgeoise, qui est en somme le garant que la poursuite pro-active de l’APD et de nos obligations en matière de lutte contre le changement climatique et les principes de justice climatique qui en découlent ne soient remis en cause, dépend aussi des conditions matérielles dans lesquelles elles pourront évoluer, dans un contexte où leurs moyens sont, à certains égards, menacés.

Nous laissons à nos lectrices et lecteurs le soin de découvrir cette première édition du Brennpunkt de l’année 2024, dédiée en grande partie au programme gouvernemental de la nouvelle coalition issue des élections d’octobre 2023.

Brennpunkt Drëtt Welt est édité par Action Solidarité Tiers Monde
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